Médée Kali, opéra de chambre livret de Laurent Gaudé Opéra lauréat de l’association Beaumarchais-SACD Médée a tué ses enfants. Le temps a passé et l’idée que ses fils reposent en terre grecque lui est insupportable. Elle revient sur le tombeau de ses enfants pour les en extraire et pouvoir les inhumer sur les bords du Gange. Elle veut que sa vengeance soit totale. Mais, Médée est suivie par un homme qu’elle ne connaît pas. Elle aime sa présence. Elle sent qu’elle sera bientôt à sa merci. Parce qu’il est beau et que Médée n’a jamais su résister à la beauté des hommes. (Actes Sud) Médée Kali, est un opéra pour un personnage. J’ai été séduit par l’écriture de Laurent Gaudé ; un style fort, sobre, aux mots et aux rythmes percutants. En choisissant ce texte, je souhaitais explorer la dramaturgie qu’impose un monodrame. Il fallait creuser et développer une écriture vocale pour une chanteuse soliste, combiner différents types d’écritures afin de trouver différentes palettes sonores pour renouveler le discours et entretenir l’attention du public tout au long de l’ouvrage. C’est la personnalité de Médée qui m’a donné ces pistes vocales. Médée est multiple et complexe. A chaque scène, nous découvrons une «facette» de Médée. Médée Kali est un récit terrible. L’histoire est noire et intense. Une femme nous raconte avec sang froid, sa vie, sa trahison, sa vengeance. Nous avons huit tableaux à travers lesquels la personnalité de Médée Kali se dévoile. Nous découvrons à la fois une femme aimante, passionnée, dévouée, et une Médée séductrice et aveuglée par la beauté des hommes. C’est aussi une femme blessée, humiliée, remplie d’une détermination excessive. Il y a des images d’une violence insoutenable. Lorsque que Laurent Gaudé nous parle de sexe et d’orgie, c’est à la limite de la pornographie. Lorsqu’il nous parle du meurtre des enfants, c’est à la limite de l’insupportable. Certains passages sont une catharsis de notre propre violence. Et c’est précisément ce que j’ai voulu faire rejaillir dans ma musique, ces sentiments extrêmes et violents. Cela donne une musique contrastée : la brutalité, la sauvagerie, la folie, la sensualité mais aussi la sérénité et l’apaisement m’ont guidé vers une multiplicité de palettes sonores. Nous avons des harmonies complexes, denses avec des rythmes brusques. Nous avons aussi des mélodies épurées, suaves et très «lisibles». Dans certains passages, je me détache volontairement du sens de la dramaturgie. Je prends le contrepied musical de la noirceur de ce texte. Dans mes compositions, je suis sensible à allier la création musicale savante à la création musicale populaire. Je développe un espace où modernité et tradition sont présents. C’est un espace musical, un temps rythmique, un temps poétique rempli d’intensité, de contrastes et de lyrisme. copyright Jimmy Vallentin « Une remarquable création musicale » « Cette œuvre ambitieuse d’un jeune compositeur honore encore la créativité musicale bouillonnante » presse Virée macabre – Zibeline – Mai 2013 Le dernier événement du Festival Les Musiques du Gmem (associé à Musiques en chantier) proposait la création d’un «Opéra de chambre» du compositeur Lionel Ginoux : une mystérieuse Médée Kali, imaginée d’après un livret de Laurent Gaudé qui s’inspire et développe le mythe de l’antique meurtrière, infanticide et magicienne trahie par Jason. Les Chroniques de Benito Pelegrin – juin 2013 D’une durée d’une heure et quart, Médée Kali est présenté comme « un opéra de chambre » pour soprano, saxophone, alto, violoncelle, piano et sons fixés sur bande magnétique. Les sons enregistrés, bruits, monologue parlé, brefs dialogues des enfants, causent un mélange habile de déplacements de l’attention auditive par la diversification des sources sonores, mais sans nulle solution de continuité, dans un flux continu très dominé. Mais, avec un seul personnage, les enfants étant cantonnés à un enregistrement de quelques phrases sur bande, sans vraie action dramatique qui exige exposition, nœud de l’intrigue, péripéties et dénouement, plus que l’opéra de chambre annoncé, il s’agit d’une grande cantate ou d’une scène lyrique moderne comme Erwartung de Schönberg monodrame pour soprano solo mais deux fois plus longue ou, quelquefois, cette déclamation française rappelle le Satie de La Mort de Socrate, sans qu’on puisse assigner des repères stylistiques précis à cette œuvre personnelle. Sur ce long texte, Ginoux a bâti une vaste partition sur mesure pour la grande voix dorée, au médium fruité et feutré, de Bénédicte Roussenq, soprano radieux, éclatant dans les aigus pleins, large volume, tessiture longue, égale. Cependant, le compositeur ne concède nulle facilité à son interprète : médium très sollicité, sauts impressionnants du grave à l’aigu, un parlando a cappella, voix nue, mais lui ménageant prudemment des passages parlés enregistrés et les rares paroles des enfants qui lui permettent un peu de souffler dans cette déclamation dramatique longue et souvent tendue. Les qualités expressives de Roussenq, son art des couleurs, son sens dramatique puissant, servent texte et musique avec une grandeur héroïque et des nuances remarquables. Avec pour base et basse souvent le piano tout aussi puissant et nuancé de Marion Liotard, qui mène le jeu et conduit l’ensemble avec une rigoureuse attention et une souplesse de chef de chant, tout en les concertant parfaitement, Ginoux traite chaque instrumentiste en soliste avec des parties virtuoses pour chacun mais, sur le nappage des cordes, soudain bruissantes et vibrionnantes de l’alto (Laurent Camatte) et vibrantes du violoncelle (Adeline Lecce), le saxophone de Joël Versavaud, soupire, sanglote parfois, se déchire de stridences, devient comme l’écho souffrant de la voix de Médée ou, soudain, le prolongement confidentiel de son souffle. Les sons enregistrées, des timbales mystérieuses, des frottements, écoulement de l’eau, les minuscules voix d’enfants, amplifiées, venues de loin, auréolent l’ensemble de timbres d’un charme étrange venu d’ailleurs.
Le 15 mai aux ABD Gaston Defferre, on suit un monologue tragique, puissamment servi par la soprano Bénédicte Roussenq, au fil d’une partition tendue, éprouvante, qui se souvient de Schoenberg (Erwartung) ou Strauss (Elektra). Un quatuor instrumental (Joël Versavaud aux saxophones, Adeline Lecce au violoncelle, Marion Liotard au piano et Laurent Camatte à l’alto) soutient la fureur de l’héroïne lors d’une scène orgiaque… comme dans l’attente statique… souligne la désolation statuaire du tombeau, la sensualité de l’amante ou la froideur tranchante d’une scène de crime, lorsque ses fils agonisent dans ses bras assassins… À cette facture puissante, tragique, s’agrègent des «sons fixés sur bande» figurant l’onirique vent du voyage, les eaux du Gange d’où cette Médée réinventée serait issue, le feu du bûcher, autant d’éléments (purificateurs ?) auxquels s’ajoute encore la terre, froide, d’où la mère exhume ses enfants trépassés et dont on entend les voix, fantomatiques, «hors-champ»…
Pareil à l’homme mystérieux qui file l’héroïne dans l’histoire chantée, on emboite le pas à cette Médée-là, au cours de son voyage, d’un récit passionnant, dérangeant, cyclique : un aller-retour de l’Inde à la Grèce, haletant, sanguinaire, au rythme d’une alternance mixte (vocale & instrumentale, électronique & récitée) jusqu’aux portes de la folie, dans l’intimité de sa voix intérieure, indéchiffrable, de ses fantasmes, sa danse macabre…
Jacques Freschel
Benito Pelegrin
1 soprano durée 75′ création 15 mai 2013, Festival Les Musiques Gmem Laurent Gaudé, auteur commande Act’tempo + lauréat de l’association Beaumarchais-SACD Enregistrement à la Grange / studio Alys lors de la résidence de création avec Bénédicte Roussenq (soprano), Joël Versavaud (saxophones), Laurent Camatte (alto), Adeline Lecce (violoncelle), Marion Liotard (piano), Tracy Thine et Brune Girerd (les voix des enfants) prochaine représentation première résidence de création
1 saxophone (soprano et ténor)
1 alto
1 violoncelle
1 piano
électronique
Bénédicte Roussenq, soprano
Joël Versavaud, saxophones
Laurent Camatte, alto
Adeline Lecce, violoncelle
Marion Liotard, piano
20, 21 et 22 avril 2018 Barcelona Modern Project Ensemble, Xavier Pagès-Corella direction, Moreno Bernardi chorégraphie, Josep Abril costumes, Txell Miras scénographie // Théâtre Hiroshima / Barcelone
15 mai 2013 aux ABD Gaston Defferre // Festival Les Musiques (gmem-cncm-marseille)
du 29 octobre au 3 novembre 2012 Chartreuse de Villeneuve-lez-Avignon et du 6 au 11 mai 2013 au Studio Alys