Eugenia, opéra en dix-sept scènes
pour huit chanteurs, orchestre et ballet
texte de Pascal Rambert

 

Note d’intention

Eugénia est un opéra philosophique, humaniste, vériste, sociologique pour 8 chanteurs et orchestre (et un ballet). Eugénia (le personnage) est une jeune et grande actrice. Elle est dans sa chambre, allonger sur son lit. Elle vit ses dernières heures. Un cancer du cerveau la ronge à petit feu. Sa famille et ses amis proches viennent lui rendre une dernière visite. C’est le moment où les non-dits rejaillissent, explosent… Tout ce qui a été accumulé, intériorisé, ruminé depuis des années éclate au grand jour. C’est une gifle en pleine figure que tous les personnages se prennent. Personne n’est épargné : la mère, le père, la soeur, le mari, le beau-frère, la fille, le fils, le prêtre, le médecin… Et dans ce dernier combat, ces derniers coup de poings lancés, ces mots claquants et lacérés, chacun tente de rétablir une (ou sa) vérité. Nous découvrons à ce moment précis la sensibilité et la fragilité de chacun. On gratte la carapace sociale et on trouve des personnes fragiles, sensibles. C’est émouvant. Lorsque la carapace saute, nous entrons alors dans la profondeur et l’intimité des personnages. Cela nous porte à réfléchir sur notre propre vie, notre propre vécu, notre propre parole restée enfermée au fond de nous, par peur de mal faire, par peur de fâcher, de blesser, ou simplement par peur d’affronter le regard de l’autre… Eugénia est une mise en abîme de ce qui nous hante tous les jours : la mort, la vie, la perte, l’amour, l’autre, l’art, l’argent, la religion, le succès, l’égo, l’alcool, les déceptions, le besoin de spiritualité. Des sujets de réflexion fondateurs que nous traversons chacun, à un moment de notre vie.

 

Musique

Eugénia est mon cinquième opéra et mon premier opéra avec orchestre. Il me fallait un texte fort, poignant, qui parle de notre époque, qui nous fasse réfléchir sur ce que nous traversons. J’avais en plus la nécessité de trouver une langue qui se prête à la musique… Ce n’est pas facile à trouver… J’ai trouvé cela dans l’écriture de Pascal Rambert avec sa pièce de théatre « Actrice ». C’est pour moi une magnifique rencontre d’un texte et d’une écriture.
Avec Pascal Rambert nous plongeons dans l’arène de la vie… dans la jungle de la société. Nous sommes happés par de longs monologues qui nous décortiquent l’être, l’humain, en nous plongeant dans l’intimité des personnages et donc, en nous plongeant nous même dans notre propre personnage. Pascal Rambert nous confronte à nos propres ruminations, nos propres non-dits…

C’est cette réflexion sur l’humain, sur la relation à l’autre que je cherchais à mettre en musique. Ce n’est pas une action mais un état, un ressenti, une sensation. Je souhaitais travailler sur un opéra philosophique où le temps musical peut être aussi un élément de réflexion. Dans Eugénia, l’auditeur se voit basculer et absorber par la musique, la scène, le texte pour entrer dans sa propre intimité, son fort intérieur…

J’ai composé une musique lyrique, vocale, sensible, poignante qui ne se refuse rien, ni la mélodie, ni la texture, ni la consonance, ni l’épure. Le tout pour moi est que chaque élément soit porteur de sens, de dramaturgie, que la musique puisse porter la parole. Je ne me pose pas de question sur le langage, sur la contemporanéité, sur des codes à respecter pour entrer dans la case de la musique contemporaine. Laissons cela aux spécialistes. Pour ma part je souhaite casser les cases, non pas en proposant une énième musique sur l’expérimentation sonore mais en proposant une musique sensible, lyrique, poignante qui puisse raviver l’intérêt des ouvrages contemporains pour un public amateur, non spécialiste de la musique contemporaine. A l’instar d’un roman je souhaite que mes opéras puissent étonner le public et que mes ouvrages puissent résonner en eux et déplacer le regard.


distribution

Eugénia, mezzo-soprano
Ksénia, mezzo-soprano
Galina, soprano
Eugéni / Alexander, ténor
Pavel / Stanislav, baryton basse
Igor, ténor
Dimitri / Ivan / Artem, contre-ténor ou mezzo-soprano
Svetlana / Yulia / Sergueï, soprano

 

instrumentation

2 grandes flûtes (dont un piccolo)
2 hautbois (dont un cor anglais)
2 clarinettes en sib (dont une clarinette basse)
2 bassons (dont un contrebasson)
2 cors en fa
2 trompettes en ut
1 trombone ténor (avec le barillet) 
timbales
violons I
violons II
altos
violoncelles
contrebasses (5 cordes)

détails

durée 140′